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Ce que l'on garde - What stays with us - تاسیان
Saba Heravi et Michelle LaSalle

Du 14 avril au 20 mai 2023, vernissage le vendredi 14 avril à 17h30 

Ce que l’on garde / What stays with us / تاسیان

Tant de notre temps à la maison est passé entre des états de tendresse et de distraction. Parmi les amoncellements de choses éparpillées, destinées à être réorganisées dans des boîtes comme autant de micro-poubelles, voitures, dinosaures, briques LEGO et souvenirs se trouvent compartimentés au fil d’un projet d’épuration continu qui nous renvoie périodiquement à notre relation avec les autres et nous-mêmes.

Ce processus de tri et d’élimination instrumentalise l’oubli comme moyen de survie à ce qui vient après; chaque reliquat un rappel implicite de l’identité que l’on écarte au profit d’un nous futur. Tout contact entre l’objet et le soi — les empreintes collantes de doigts, les taches huileuses qui s’accumulent sur les comptoirs, les monticules de vêtements tiédis par la sueur, le grondement inégal des roues en plastique sur les planchers de bois — contient la matérialité inhérente à ce processus de manipulation et d’effacement. Ces rencontres nous ancrent dans une conversation intime. Pour un instant, elles mettent en valeur la mutabilité des surfaces quotidiennes, laissent la place à l’inactivité, et éclairent la beauté au cœur de nos présences éphémères.

Les œuvres de Ce que l’on garde / What stays with us / تاسیان font écho à ces apparitions temporelles. Les objets et leurs empreintes y sont exposés comme autant d’archives mnémoniques révisées et renouvelées, altérant notre perception du passé et notre expérience des moments vécus comme monotones. Plutôt, ce corpus nous invite à nous attarder aux valeurs enchâssées ou cachées dans chaque conversation, annotation, ou acte d’indexation.

Cette recherche d’un contact réel ou métaphorique avec ces fragments nous connecte momentanément par l’acte de se souvenir. Ce désir, ce toucher, nous plonge dans les souvenirs revisités dix ans après leur mise au tombeau : échos de bruyantes réunions de famille, vestiges archivés sous une couche de poussière, peaux ridées et voix enrouées par des années de rires et de pleurs.

Les œuvres de Michelle LaSalle et Saba Heravi agissent comme des simulateurs mnémoniques qui résistent à ce phénomène d’enfouissement. Grâce à la nature interactive de chaque pièce et la capacité de l’estampe photographique à enregistrer et transmuter, les objets exposés aident artistes et publics à accéder aux paysages oniriques d’une mémoire qui interroge la linéarité du temps, les limites linguistiques et géographiques, et ce désir d’immortalité se manifestant chez l’humain par la tendance à accumuler des objets. Une série de systèmes de classement — livres, calendriers, albums photos — donnent forme à un ensemble où présent et passé se réactivent à travers les échanges et témoignages qui surviennent au point de contact entre nos objets et nous, entre les êtres qui nous sont chers et leurs histoires.

Chaque artiste, à sa façon, ralentit et manipule le temps. Chacune porte à notre attention les souvenirs insoupçonnés des objets du quotidien à travers leur présence matérielle et temporelle. Se livrant à une remise en cause soutenue (quoique toujours bienveillante) des évènements, le duo accueille ces états liminaux comme autant de tendres interférences, de douces révisions.

- Texte d'exposition par Stephanie de Couto Costa


Saba Heravi est une artiste irano-canadienne basée à Tiohtiá:ke/Montréal. Elle est née en Iran et a déménagé au Canada en 2012. Après avoir obtenu un baccalauréat en architecture en Iran, elle a complété sa maîtrise en génie du bâtiment à Concordia University. En 2015, Saba a décidé d’étudier dans le programme de beaux-arts de Concordia University et a obtenu un baccalauréat en arts visuels en 2019. Sa pratique se situe autour du dessin, de la céramique et des arts imprimés. Ses œuvres abordent l’idée du foyer, de la mémoire et de l’identité en tant qu’exploration de soi-même. Elle a participé à des résidences à l’Atelier Circulaire et à la Maison des métiers d’art de Québec. Ses œuvres  ont été présentées dans plusieurs expositions à Montréal, notamment à Artch en 2019, au Centre culturel Georges-Vanier en 2019, à McClure Gallery en 2021 et à la Maison de la culture Notre-Dame-de-Grâce en 2022.

Michelle LaSalle vit et travaille à Tio’tia:ke – Mooniyang – Montréal, sa pratique est multidisciplinaire mais elle s’intéresse surtout à l’estampe et à son déploiement dans l’espace. Elle a complété une maîtrise en arts imprimés à l’université Concordia en 2022 et un baccalauréat en arts visuels et médiatiques à l’UQÀM en 2015. Lauréate de la bourse Denis-Charland 2021 et du prix Albert-Dumouchel 2014, elle a participé à plusieurs résidences de création au Québec et au Canada, en plus d’y exposer son travail. En 2023, son projet “Une buée de tous les jours’’ fera l’objet d’une exposition en duo chez Arprim à Montréal et en solo au SNAP à Edmonton. Elle fait aussi partie de la sélection officielle de la 13e Biennale Internationale d’estampe contemporaine de Trois-Rivières.

 


Crédit photo : Jean-Michaël Seminaro

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